Je pourrais aussi l’appeler « invasion », « gangrène », ou tout simplement « croissance sans limite ». L’idée d’une d’une invasion progressive est extrêmement présente dans mon travail, qu’elle soit à connotation positive (foisonnement des plantes) ou négative (propagation d’une moisissure ou de bactéries).
L’idée de l’envahissement et de cette accumulation, je la retrouve également dans la nature, dans certaines plantes, et plus particulièrement dans la mousse. Qu’elle pousse sur la roche, la terre ou bien les arbres, la mousse envahi et protège sous ses fibres douces un colonie de petits animaux. Parasite mais également protectrice, elle semble croître à sa guise pour peu qu’on lui donne le temps dont elle a besoin.
Dans ma peinture, les couleurs se superposant en des flaques intenses et se mêlant les unes aux autres suivent cette idée. Elles se développent d’une façon presque organique, cohabitant les unes avec les autres, parfois créant une nouvelle combinaison, parfois s’opposant, luttant pour leur survie.
Les couleurs ne sont pas les seules éléments qui transmettent cette idée les matériaux utilisés sur et sous la peinture ont leur propre histoire à raconter. Ce sont souvent des histoires de conflits, des craquelures comme des blessures, des bosses comme des cicatrices et des amas grumeleux comme des développements spontanés de bactérie, de champignons et d’autres présences organiques opportunistes.
Dans le tableau ci-dessus, « Love Song » j’ai recherché comment une relation amoureuse (courte de quelques secondes ou longue de plusieurs années) se développait. On y trouve souvent des blessures, des craquelures, mais aussi des moments lumineux. Bien d’autres expériences apparaissent, comme des amas grumeleux, et deviennent à la fois le paysage qui entoure cette histoire sentimentale, et les règles qui la régissent puisque ces expériences ont des conséquences.
Ci-contre, « Corruption » s’inscrit dans la même veine. La gangrène est bien présente, et sous les dalles craquelés, fragiles comme des coquilles d’œufs (ce qu’elles sont), court le poison qui se répand sur toute la toile.
Je ne cherche pas a donner de leçons dans mon travail actuellement, j’invite a voir, à réfléchir. Peut-être était-ce important que ce glacis hypocrite soit fendu. Mais est-il pour autant raisonnable de laisser une situation se corrompre et pourrir? Là est une question que je laisse moi-même en suspens faut de pouvoir y donner une réponse généraliste. Dans un cycle de vie ou l’on voit le foisonnement des plantes au printemps puis leur pourrissement en automne on serait tenté d’appliquer la même logique à nos expériences et nos relations interpersonnelles. Cependant nous luttons souvent contre. Beaucoup refusent des séparations, des disparitions ou tout simplement des changements moins déchirants. Comment réagir à ce changement est une question bien vaste que je ne vais pas aborder ici.
Certains voient cet envahissement, cette accumulation sans fin au cours de leur vie comme lourde, pour eux, l’oubli est une bénédiction. D’autres voient cela comme des trésors qu’il doivent garder absolument, faut de perdre une certaine richesse.
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